Parcourant le portail dédié aux MITIC dans l'enseignement fribourgeois (<a title="fri-tic" hreflang="fr" href="www.fri-tic.ch">fri-tic</a> pour les intimes), je tombe sur une recommandation pour l'achat d'une suite bureautique destinée à l'environnement scolaire...

Je dois m’y reprendre à deux fois pour bien être sûr de ce que j’ai lu :

Le Centre fri-tic ne recommande pas la migration vers une suite bureautique libre (par exemple OpenOffice, LibreOffice), malgré les économies potentielles sur le prix des licences.

Non, le gras n’est pas de moi, vous pouvez contrôler. Donc le service de l’enseignement du canton de Fribourg, via son portail « fri-tic » propose l’achat de licences Microsoft afin de limiter la complexité de migration et d’utilisation d’un autre logiciel que le monopolistique Office. Et ceci en 6 arguments. Prenons-les dans l’ordre :

Argument 1

Complexité accrue pour la collaboration entre enseignant-e-s
Lors d’échanges de documents entres collègues de différentes écoles, les divers formats compliquent la tâche des enseignant-e-s.

Au contraire, si tous les collègues ont LibreOffice installé sur leur(s) ordinateur(s), ils n’auront pas de souci. Il est bien plus facile d’installer une fois pour toutes LibreOffice au cas où un collègue m’envoie un document ODT que de trouver une version de Word si je ne l’ai pas sur mon ordinateur (ou si celui-ci tourne sous Linux…)

Argument 2

Complexité accrue dans la collaboration dans le domaine administratif
Les autorités scolaires utilisent la suite Microsoft Office. L’utilisation d’autres logiciels complique l’échange des documents entre enseignant-e-s et ces autorités.

En général, les documents reçus par les enseignants de la part des autorités sont plutôt dédiés à la lecture et qu’à la modification. Le format PDF convient alors merveilleusement bien. Au cas où les documents devaient être complétés, LibreOffice supporte suffisamment bien le .docx pour que la communication passe (l’inverse n’est pas vrai, évidemment).

Argument 3

Charge supplémentaire lors d’un changement de logiciel majeur
Une charge importante est mise sur les enseignant-e-s lors d’un changement de logiciel très utilisé. Cette charge peut conduire à des réactions de rejet, avec pour conséquence une utilisation moindre des MITIC dans l’enseignement.

Je ne pensais pas que le choix d’un logiciel de bureautique influencerait l’utilisation des MITIC. Si les élèves doivent créer un document avec un logiciel, ils s’habituent très vite à ce qu’ils ont à disposition. J’utilise personnellement soit LibreOffice (et cette année on a installé plutôt OpenOffice) soit iWork. Les élèves ont parfois le choix, parfois j’impose le logiciel. Au moins, ils finiront leur Cycle d’Orientation avec une certaine ouverture d’esprit concernant l’utilisation de logiciels et une plus grande souplesse quant à leur utilisation.

Argument 4

Augmentation des coûts de développement des séquences et support didactiques
Les séquences et support didactiques doivent être développés dans différents formats, ce qui double au moins les coûts de production.

Ou alors, ils ne sont développés que dans un seul format libre, ce qui diminue les coûts ! Actuellement, on assiste à une multiplication des formats, des systèmes d’exploitation, des langages de programmation. Un logiciel, par exemple, doit être codé pour Windows, MacOS, Linux, iOS, Android, etc. C’est complètement fou l’énergie qui est mise dans la traduction d’un même logiciel. Dans l’enseignement, choisissons un seul format libre, c’est bien plus simple puisqu’on est alors certain que chacun pourra le lire !

Argument 5

Augmentation des coûts de formation
La formation continue doit être organisée en tenant compte de plusieurs logiciels, ce qui augmente les coûts de formation.

C’est un avantage de tenir compte de plusieurs logiciels. En cours d’informatique, je force mes élèves à changer de logiciel, à recommencer parfois leur exercice sur un autre programme. Pensez-vous qu’ils soient perdus ? Au contraire : la deuxième version de l’exercice est bien plus vite réalisée que la première !

Argument 6

Diminution de la mobilité des enseignant-e-s
La mobilité des enseignant-e-s entre établissements ne disposant pas des mêmes logiciels est compromise.

J’ai travaillé dans un établissement où un tableau numérique était à disposition pour essai. Celui-ci, de marque Smart, était utilisable à l’aide d’un logiciel fourni par le fabricant. Actuellement, ayant changé d’école depuis deux ans, je dispose de projecteurs interactifs Epson. Le logiciel libre utilisé est Sankoré. Si j’avais créé des documents avec Smart, j’aurais été bon pour tout recommencer ! Par contre, les documents créés avec Sankoré fonctionneront avec n’importe quel matériel. La mobilité est favorisée par les logiciels libres ! Les grosses entreprises informatiques (Microsoft, Apple, Google pour ne citer qu’elles) rendre les utilisateurs captifs. C’est pourquoi Apple offre désormais ses logiciels. Le prix n’est plus une raison de passer dans le monde du libre, la seule et unique raison, c’est la liberté.

Conclusion

On comprendra aisément que M. Nicolas Martignoni, qui a écrit cet article sur fri-tic, cherche la facilité (surtout ne rien changer) et la vente de licences de chez Microsoft. C’est certain qu’en travaillant pour educa.ch (cf. son adresse de courriel), il ne peut que mettre en avant le « nouveau contrat-cadre négocié avec Microsoft à la fin de l’année 2013 » et les tarifs préférentiels proposé.

Je relève finalement que le Plan d’Études Romand demande expressément la « sensibilisation aux notions d’Open Source et de logiciel libre » (ici). Ce n’est qu’en utilisant nous-mêmes et avec les élèves que cet objectif sera atteint. L’enseignant peut bien dire que ça existe, montrer à quoi ça ressemble, ça n’aura aucun effet si l’élève ne touche pas au logiciel libre.