Première année niveau 2, puissance. Tout est dit, ou presque...

Chapitre difficile et notion ingrate, les élèves confondent, mélangent, ont toutes les difficultés du monde pour « sentir » ce que signifie une puissance. Ça fait quelque temps que je me dis qu’il faut rendre ça plus concret, plus perceptible, palpable, tangible, visible ! J’ai testé cette année une façon assez originale et sympathique d’aborder les puissances. Il faut dire que je me pose souvent la question de la confusion entre les opérations, et que j’essaie tant bien que mal d’y remédier.

Introduction

J’utilise l’exercice du triangle de Sierpinski proposé dans les Manuels Sésamath (modifié à ma guise, mais ce n’est pas là le sujet de l’article) pour donner une définition de la puissance. C’est une activité intéressante parce que les élèves prennent conscience de deux choses

  • la définition d’une puissance comme le produit d’un nombre par lui-même ;
  • la « vitesse » à laquelle augmente la quantité de triangles au fur à mesure de l’accroissement de l’exposant.

Malgré cette réalité des triangles coloriés, il manque un peu de concret. Passons à la deuxième phase !

Les puissances (et les autres opérations) par les pieds

Attention, j’ai bien dit « par » et non pas « comme »…

L’idée est la suivante : pour se rendre compte de la différence entre les opérations, leurs effets sur les nombres, les élèves vont créer une espèce de droite numérique grandeur nature en se positionnant dans l’espace, selon le résultat d’un calcul.

J’explique (au fond de l’article, un document pour l’enseignant) :

  • chaque élève se voit attribuer un nombre naturel (de 1 à n, n étant le nombre d’élèves de la classe)
  • on travaille d’abord avec 1 et l’addition
  • les élèves vont « 1 + leur nombre »
  • ils se placent à cette distance (mesurée en pas) d’un point appelé 0
  • résultat : ils sont tous espacés d’un pas, et ils sont placés à un pas de leur nombre de départ

Ensuite, on recommence, mais avec la multiplication :

  • les élèves font donc « 1 · leur nombre »
  • ils se placent à nouveau
  • résultat : ils sont tous espacés d’un pas, mais contrairement à avant, ils sont placés sur leur nombre de départ

Et on change d’opération : puissance

  • les élèves font « 1 puissance leur nombre »
  • ça se corse un peu, certains veulent faire « leur nombre puissance 1 »
  • résultat : ils sont tous en tas à 1 pas de 0

Jusque-là, rien de bien sorcier, ça va assez vite, les calculs et les positionnements sont suffisamment aisés pour se concentrer sur la compréhension de la consigne et de l’activité.

On peut donc changer de nombre et recommencer au départ :

  • 2 + leur nombre
  • 2 · leur nombre
  • 2 puissance leur nombre

Cette fois-ci, les résultats changent, et on fait des liens avec la première partie. Pour l’addition, l’espace entre les élèves est toujours de 1, mais ils sont à 2 pas de leur nombre de départ. Pour la multiplication, l’espace entre les élèves est de 2 pas. Et pour la puissance, si la classe est grande il y a des élèves qui vont devoir aller assez loin…

Et ce qui devait arriver arrive, on recommence avec 3 :

  • 3 + leur nombre
  • 3 · leur nombre
  • 3 puissance leur nombre

On repère rapidement les élèves qui commencent à sourire en pensant au copain qui va devoir courir à l’autre bout du village pour la puissance… Ces élèves ont compris, bien qu’ils ne se rendent pas vraiment compte de la distance à laquelle le dernier doit aller !

Le principe de l'activité
Le principe de l’activité

Résultat

Cette activité permet de saisir deux choses :

  1. la distance entre les élèves est constante pour l’addition (toujours 1) et la multiplication (toujours le coefficient), mais pas pour la puissance. Cette distance augmente alors très très très rapidement ;
  2. même avec une petite base, le résultat est très rapidement immense.

En discutant de l’activité avec un collègue, n s’est posé cette question, que j’ai posée à la classe immédiatement le cours suivant : combien d’élèves faudrait-il pour que le dernier fasse le tour de la Terre ? Il faut dire que j’ai une toute petite classe, et que quelques élèves n’ont pas fait l’activité. Bref, j’avais 8 élèves…

J’ai donc laissé la calculatrice, profité de montrer la touche « puissance », et attendu que les élèves me donnent la réponse. Elle est venue et était vraiment inattendue pour eux : 16 élèves seulement !

\[3^{16} = 43\,046\,721\textrm{ mètres} > 40\,000\textrm{ km}\]

À refaire ?

Assurément ! Je vais sûrement mettre en place cette activité avec d’autres années dans d’autres situations, comme les fonctions par exemple. Ce n’est pas compliqué à organiser, il faut juste un peu d’espace dans la cour.

Avec des niveau 1, on pourrait imaginer travailler sur les unités pour arriver (ou pas) à placer tous les élèves sans qu’ils doivent faire le tour de la Terre.

En conclusion, cette activité fait travailler le cerveau, les pieds et les yeux : la position des camarades et l’espace entre eux sont assimilés tant par le résultat visuel que la distance parcourue à pied, et évidemment par les calculs effectués. Les oreilles ont aussi fonctionné, lorsqu’il a fallu appeler l’élève parti à \(2^8\) mètres pour qu’il revienne. Comme souvent, il ne manque plus que le goût ! Vivement les fractions et les partages de gâteaux…

Documents joints